Chassez le naturel, il revient au galop !

 Dans la catégorie France, Histoires du soir

La maxime “Chassez le naturel, il revient au galop !”

Un jour, un lièvre et un singe se mirent à discuter avec joie et cœur. Tout en échangeant, les deux animaux pratiquaient leurs tics animaliers respectifs.

De temps en temps, le singe se grattait avec ses longues mains, alors que le lièvre, toujours sur la défensive de peur d’être dévoré par un prédateur, tournait sa tête dans tous les sens dans l’éventualité d’apercevoir l’un d’entre eux, tant redouté.

Les deux bêtes ne pouvaient pas être tranquilles, ne serait-ce qu’une seule minute.

Le lièvre dit alors au singe : “C’est hallucinant, tu ne peux rester immobile plus d’une minute sans te gratter !”

Ce à quoi répondit le singe “Ceci n’est pas plus étonnant que de te voir tourner la tête sans cesse et dans tous les sens !”

Mais le lièvre rétorqua alors “Oh, mais si je le souhaite vraiment, je peux m’en empêcher !”

“Alors, voyons si tu peux faire ainsi, essayons tout et moi de rester immobiles. Celui qui bouge le premier perd son pari !”

Ce à quoi le lièvre répondit par la positive. Et tous deux tentèrent alors de ne plus faire un seul mouvement.

Mais la situation ne tarda pas à devenir insupportable pour les deux compères. Les démangeaisons du singe devenaient abominables, et le lièvre sombra dans une angoisse d’une rare intensité.

Puis, vint le moment où le lièvre lança au singe : ”Mais au fait, notre pari ne nous interdit pas de nous raconter quelques histoires afin de rendre les choses moins pénibles, mon frère singe ?”

“Assurément !” répondit le singe qui ne pouvait s’empêcher de se douter que son compère mettait en place un stratagème.

“Je commence donc !” Dit alors le lièvre ; “Figures-toi que lors d’une saison sèche, je me trouvais dans une plaine très vaste, et je courais de graves dangers….. “

“Tiens ! “ s’exclama subitement le singe, “Il m’est arrivé exactement la même chose !”

Le lièvre continua, étonné ; “Oui ! Des chiens se mirent à courir après moi en aboyant très fort ! Ils venaient de tous les côtés ! Droite, gauche, derrière, devant ! Je me tournais de ce côté, puis de l’autre, je les voyais aussi derrière moi ou encore devant !”

Mais… tout en parlant, le lièvre, entraîné par sa propre histoire, mimait son récit et regardait dans toutes les directions qu’il décrivait.

C’est alors que le singe, une fois l’histoire de lièvre terminée, débuta son propre récit ;

“Un mauvais jour, un groupe d’enfants se mit à me pourchasser, et à me jeter des pierres…. J’en recevais ici, puis là, et puis ici !”

Et tout en décrivant les endroits sur lesquels les pierres l’atteignaient, il mimait ces endroits en se grattant ! Il indiquait chaque partie de son corps avec rapidité tout en en profitant pour se gratter, afin d’en finir avec ses démangeaisons devenues insupportables.

Le lièvre se mit alors à rire à plein poumons ! Et le singe, en le voyant, se mit également à éclater de rire de tout son cœur !

Il se dirent alors tous deux: “Voyons, nous avons beau dire ou faire, nous ne pouvons pas changer notre nature. La preuve est faite. Tenons-en nous là. Personne n’a gagné ce pari, mais personne ne l’a perdu !”

Quelle est l’origine de la maxime “Chassez le naturel, il revient au galop” ?

La version initiale de cette maxime remonte à la fin du premier siècle de l’ère chrétienne. C’est le poète Horace qui dans son épître 10, écrit en latin : “naturam expelles furca, tamen usque recurret”, ce qui donne une fois traduit : “chasse le naturel à coup de fourche, il reviendra en courant”. Puis, par la suite, c’est Jean de la Fontaine et Nicolas Boileau qui écriront des vers sur ces propos. Mais, la version connue de nos jours revient à Philippe Néricault Destouches, écrivain dramatique de la fin du 17ème siècle.

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